présentation des peintures synchronistiques

dimanche, novembre 11, 2012

Sous le toit du monde

La chaîne Himalayenne vue de Nagarkot

Le Népal, coincé entre les deux grands monstres que sont la Chine et l’Inde, était encore un royaume inaccessible aux étrangers il y a à peine cinquante ans. S’ouvrant enfin au monde dans les années soixante, il devint pour un temps l’El Dorado des hippies à la recherche de psychotropes et de zenitude bouddhiste.

C’est aujourd’hui un simple état du tiers-monde, parmi les plus pauvres, semblable sous beaucoup d’aspects à tant d’autres pays démunis : infrastructures approximatives, institutions politiques précaires, ville centre tentaculaire et polluée, accueillant l’exode rural poussé par la misère des campagnes.

Katmandou 

Katmandou, avec ses axes routiers saturés, ses bus pourris crachant une fumée noire ; avec le vacarme incessant des klaxons remédiant tant bien que mal à l’absence quasi totale de code de la route ; avec ses réseaux de fils électriques et téléphoniques formant d’improbables écheveaux sur lesquels circulent de grands macaques ; avec la poussière déposée le long des rues sans trottoirs, qui s’accroche aux buissons et que le soir les tenanciers d’échoppes tentent de circonvenir, devant leur pas de porte, à l’aide de petits ballets de paille qui la fond voler plus qu’ils ne la chassent ; avec ses chemins déglingués traversant des quartiers où pullulent les nouvelles maisons en briques à ossatures de poteaux béton, laissant les fers en attente ; avec ses terrains vagues et ses rivières qui sentent l’égout ; avec ses bazars congestionnés déroulant à perte de vue de minuscules boutiques vendant toutes à peu près les mêmes choses, que ce soit les épices, les tissus, les ustensiles ménagers, ou les pashminas, les tankhas, les masques de dieux grimaçants, et les statuettes pour touristes.

Katmandou donc, sous ces aspects de ville générique du tiers-monde, m’évoque immanquablement d’autres villes parcourues au Sahel ou au Maghreb.

Et pourtant il serait injuste de ne pas voir aussi ce qui fait son caractère purement asiatique et son impressionnante beauté :

-       D’abord il y a les trois centres historiques monumentaux, Durbar Squares de Patan, de Bhaktapur, et de Katmandou. On trouve là trois joyaux de l’art urbain newar, organisant de façon libre mais équilibrée les palais et temples des XVe au XVIIIe siècles, faits de briques et de bois de sal, sculpté comme de la dentelle, et surmontés de toit multiples en pagodes, soutenus par de grand jambages inclinés couverts de scènes érotiques. En contrepoint de ces majestueuses façades, les bassins-fontaines encaissés et protégés par les ondulations de pierre représentant le corps de Nâga, le dieu serpent ; quelques colonnes surmontées de statues, face à l’entrée des temples ; de petits autels de dévotion, toujours bariolés d’offrandes de pétales de fleurs et de prashad rouge, et parfois montés sur des socles pyramidaux ; d’insolites temples hindous de style shikhara, tout en pierre, couverts de toits à la fois lourds et élancés, aux formes caractéristiques en épis de blé ; quelques grosses cloches de bronze, aussi,  suspendues sous des portiques ; et enfin ces curieuses petites loggia urbaines en bois, appelées pati, où dorment souvent les vagabonds.

Palais de Patan, illustration extraite de "The traditional architecture of the Kathmandu valley", Wolfgang Korn, ed. Bibliotheca Himalayica, reprint 2010


-       Ensuite il y a les monastères et les stupas bouddhistes qui parsèment la ville (les plus célèbres sont le grand stupa de Bodhnath, immortalisé par le film Little Bouddha, et celui de Swayambunath qui surplombe la ville, et où ont élu domicile des nombreuses bandes de singes).

-       Et partout ces vaches qui déambulent, et les chiens galeux qui dorment sous les péristyles des temples, en attendant la nuit pour roder à la recherche de poubelles ou de restes d’offrandes.

Aspects de Katmandou : Durdar Square de Bhaktapur et rue de Thamel


-       Enfin il y a le splendide écrin de montagnes qui enserre Katmandou : si les grands sommets enneigés de l’Himalaya ne sont perceptibles que dans le lointain, les contreforts de collines s’avancent dans la plaine comme de longues racines géantes, chargées de forêts et de cultures en terrasses.

G. Chambon, Nargarkot, aquarelle, 2012


Ces reliefs particuliers, au demeurant très habités et pourvus de nombreux villages perchés, sont la matière constitutive des paysages népalais ; ils rendent assez difficiles les communications routières. Il est donc préférable d’utiliser l’avion pour se rendre à Pokhara, au pied des Annapurnas.

Pokhara, jadis bourg provincial, a pris en quelques décennies une allure de ville champignon. C’est une destination de premier ordre pour les trekkers, et de nouveaux hôtels surgissent du sol chaque année ; le centre commerçant a ainsi délaissé l’ancien bourg pour se réimplanter à proximité de la rive du lac, où se concentrent les mânes touristiques chinoise, japonaise, coréenne, indienne, et occidentale. Mais dès que l’on quitte la grande rue, les chemins qui desservent les hôtels rappellent encore le caractère villageois : quelques maisonnettes basses au toit de tôles et aux murs badigeonnés de rose indien ou de vert lagon, avec leur petit jardin potager, subsistent entre les bâtisses des établissements hôteliers,  plus hautes et bordées de balcons ; quelques échoppes de quartier,  aussi, où les didis tiennent conversation, à coté de grands ficus majestueux ; et toujours les vaches en liberté, les enfants qui s’approprient la voie pour une partie de foot, et quelques champs de mil qui survivent ça et là, avant que de nouveaux hôtels ne repoussent la campagne dans les collines voisines.

G. Chambon, Pokhara, aquarelle, 2012


Pour bien s’imprégner de ces paysages qui mêlent la luxuriance des tropiques à l’aride sérénité des plus hauts sommets, il y a l’aquarelle bien sûr…. Mais aussi le parapente !

Vol au-dessus de Pokhara

Aucun commentaire: