présentation des peintures synchronistiques

mardi, avril 14, 2015

La conversion de Paul

 
Gilles Chambon, La conversion de Paul, nouveau testament, Huile sur toile 60 x 85 cm, 2015
On connaît tous l’histoire de Paul de Tarse, d'abord persécuteur des chrétiens, qui, alors qu’il se rend à Damas, tombe à terre, ébloui par une grande lueur (qui le rendra aveugle pendant trois jours) et reçoit du Christ ressuscité l’injonction de se convertir à la foi chrétienne qu’il servira dorénavant.

Cet épisode essentiel du Nouveau Testament est parmi les scènes ayant reçu le plus de représentations picturales. L'une d'elles, peinte justement par un Paul, m’a spécialement marqué : il s’agit de la toile de Véronèse (Paolo Caliari), exécuté vers 1570, et conservée au musée de l’Ermitage à St Petersbourg. 

Paolo Caliari (Véronèse), La conversion de Saül, Huile sur toile, musée de l'Ermitage, St Petersbourg

Le cadrage et la mise en scène sont totalement bouleversés par rapport aux normes : personnages décentrés et coupés par les limites du cadre, croisement des échelles, entrelacement des lignes et des plans, superposition de l’ombre et de la lumière… En un mot vacillement des repères habituels de la figuration.

Notons que depuis Véronèse, un autre Paul - Cézanne pour ne pas le nommer - a aussi, dans un sens, fait vaciller les repères de la figuration en usage au XIXe siècle… Paul serait-il un nom prédestiné à l’éblouissement et à la conversion?

Mais revenons au tableau que je présente ici : c'est une rencontre synchronistique entre la renversante conversion de Paul peinte par Véronèse, et une œuvre abstraite d’Albert Bitran (Composition au passage beige, 1973), elle-même renversée! Paul et son comparse y semblent effrayés par l’apparition abstraite qui jaillit de nulle part et les englobe peu à peu. 
 
Albert Bitran, Composition au passage beige, 1973
 
On peut y voir une métaphore de la conversion définitive de l’art pictural à la modernité, suite au choc de l’abstraction… La cécité consécutive, comme celle de Paul, a duré un certain temps; non pas trois jours, mais au moins trente années, marquées par l’obscurantisme pictural de l’art contemporain. Mais à l’image du Christ, notre imagination est capable de tout ressusciter. Et l’art actuel s’ouvre enfin, je l’espère, au nouveau testament de la peinture.

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